Justine Mintsa est née à Oyem, au nord fang du Gabon. Elle est maître-assistante à l’Université de Libreville et elle préside depuis 1996 l’Union des écrivains gabonais. Elle publie cette année un roman bouleversant, Histoire d’Awu, dans la nouvelle, et belle, collection Continents noirs, chez Gallimard.Mariée à un homme encore jeune, mais veuf, et dont le cur est encore pris par celle qui a disparu, la vie d’Awu se passe comme un patient sacrifice jusqu’au jour où enfin il la regarde. Mais le sort ne veut pas qu’elle soit longtemps heureuse : il meurt peu après, accidenté, et elle se voit alors dépouillée de tout ce qu’une vie entière lui avait permis de construire autour d’elle.Histoire simple, donc, mais dont l’impeccable réalisme est servi par une écriture fine et sûre, souvent pleine de poésie, qui atteint à une sorte de sérénité, malgré les désillusions, l’ingratitude, l’invraisemblable méchanceté humaine, à laquelle le respect des traditions sert d’autorisation.
Dans ce monde où chacun n’est jamais responsable que devant soi-même, de ses propres actes comme de ceux des autres, Awubadiran, épouse de l’instituteur Obame Afane, homme juste et bon, est un exemple admirable d’humanité, de patience, d’amour. A qui pourrait-elle s’en prendre ? Sa vie a filé comme une tragédie, en trois actes rapides. Le temps de faire ce qu’elle devait, et tout était fini, arrêté à cette image au-delà de laquelle son existence perdait son sens : » Ils étaient habillés comme pour un bal. Mais ce fut un bal singulier que le leur. Un bal plané à la fin duquel, sur les grosses feuilles vertes du superbe kaba ocre, avaient éclos d’étranges roses, grosses, rouges et chaudes ; et, sur la chemise jaune délicatement amidonnée, ruisselait en abondance une encre rouge et chaude, qui emportait dans sa course des promesses et des rêves. »
Avec l’Histoire d’Awu, Justine Mintsa ne nous offre pas seulement un magnifique roman sur la condition de la femme dans la société traditionnelle du Gabon, elle nous livre un apologue poignant sur notre condition humaine, dans un style à la fois retenu, bouleversant et juste. — Naguib Arzel — — Afrik.com
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