– Je voulais payer des factures aujourd’hui et, une fois de plus, il ne reste rien sur notre compte. On est le 10 du mois et je n’ai pas vu passer ton salaire. Comment vais-je payer l’électricité, le loyer, faire les courses jusqu’à la fin du mois ? De ton salaire d’ingénieur, il ne te reste donc rien pour notre famille ? Et tu prétends être un homme intelligent et responsable ?
Je ne peux lui répondre. Je réfléchis. Pour ceux qui me connaissent superficiellement, j’étais, avant de rencontrer Hélène, ce qu’on appelle encore – mais sans doute pour peu de temps – un «élu des dieux». C’est-à-dire un homme né dans la misère, que les fées avaient distingué pour en faire un être à l’abri du besoin. Je dois mon droit d’aînesse à un vieil homme visionnaire ; les esprits lui avaient parlé en songe : malgré mon jeune âge, ma constitution fragile, je serais un jour responsable de tous les miens, je ferais une carrière brillante, j’aurais beaucoup d’argent, j’enterrerais dignement les anciens de mon clan, mon visage serait le soleil des morts, toute ma vie j’honorerais la tradition. Élu très tôt l’aîné de ma famille, je fus pris dans une spirale où tournoyaient avec moi tous ceux que j’aimais. Ces êtres avec lesquels j’étais censé vivre, que j’étais censé protéger, et dont je m’occupais si peu, je les voyais au contraire entraînés avec moi dans le même étrange naufrage.
– Ta famille africaine ne te fait miroiter que ton droit d’aînesse et la tradition lorsqu’elle a besoin d’argent pour payer un mariage, un enterrement de plus. Mais qu’est-ce qu’ils croient là-bas, qu’il suffit de ramasser l’argent dans les caniveaux et de l’envoyer par Western Union ? Ils savent que tu te tapes des journées de douze heures de travail pour eux ?
Nous, enfants de la tradition
10,62€
– Je voulais payer des factures aujourd’hui et, une fois de plus, il ne reste rien sur notre compte. On est le 10 du mois et je n’ai pas vu passer ton salaire. Comment vais-je payer l’électricité, le loyer, faire les courses jusqu’à la fin du mois ? De ton salaire d’ingénieur, il ne te reste donc rien pour notre famille ? Et tu prétends être un homme intelligent et responsable ?
Je ne peux lui répondre. Je réfléchis. Pour ceux qui me connaissent superficiellement, j’étais, avant de rencontrer Hélène, ce qu’on appelle encore – mais sans doute pour peu de temps – un «élu des dieux». C’est-à-dire un homme né dans la misère, que les fées avaient distingué pour en faire un être à l’abri du besoin. Je dois mon droit d’aînesse à un vieil homme visionnaire ; les esprits lui avaient parlé en songe : malgré mon jeune âge, ma constitution fragile, je serais un jour responsable de tous les miens, je ferais une carrière brillante, j’aurais beaucoup d’argent, j’enterrerais dignement les anciens de mon clan, mon visage serait le soleil des morts, toute ma vie j’honorerais la tradition. Élu très tôt l’aîné de ma famille, je fus pris dans une spirale où tournoyaient avec moi tous ceux que j’aimais. Ces êtres avec lesquels j’étais censé vivre, que j’étais censé protéger, et dont je m’occupais si peu, je les voyais au contraire entraînés avec moi dans le même étrange naufrage.
– Ta famille africaine ne te fait miroiter que ton droit d’aînesse et la tradition lorsqu’elle a besoin d’argent pour payer un mariage, un enterrement de plus. Mais qu’est-ce qu’ils croient là-bas, qu’il suffit de ramasser l’argent dans les caniveaux et de l’envoyer par Western Union ? Ils savent que tu te tapes des journées de douze heures de travail pour eux ?
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